Comment la logistique et la transitique redessinent l’atelier

Automatisation, recherche de la baisse de pénibilité pour les salariés, mais aussi hausse de la productivité et respect de l’environnement…
... autant de thèmes qui justifient un investissement conséquent dans la logistique et la transitique. État des lieux dans le monde de la menuiserie.
© MZR - MZR se distingue pour ses solutions sur mesure, comme ici avec une table de montage (TMB) Monte et Baisse pour faciliter le travail de l’opérateur
« L'objectif est de répondre à une demande client en mettant en place une solution adaptée par rapport à des ateliers toujours très différents ». Jean-Marc Boisson, technico-commercial chez MZR résume bien les défis à relever dans les domaines de la logistique et la transitique. La réponse doit être très souvent sur mesure pour s’adapter parfaitement aux différentes contraintes du client. « Cela engage à effectuer un gros travail d’étude et de prise en compte de l’environnement avant-projet pour s’adapter au flux, aux méthodes de travail… C’est notre principal travail d’être capable de proposer de petites améliorations », ajoute-t-il. Investir dans des outils de logistique et de transitique performants doit faciliter la vie des opérateurs tout en optimisant le flux de production. Pour Sébastien Charrier, directeur général de Rénoval : « avec la transitique il y a un double objectif : limiter le port de charges par les opérateurs et améliorer la productivité de l’entreprise ».
Les évolutions majeures en logistique
- digitalisation et traçabilité (ERP, QR Code…) ;
- automatisation des flux (transstockeurs, convoyeurs intelligents…) ;
- approche Lean pour réduire les gaspillages (déplacements, surstocks, attentes…) ;
- approche Just in Time (logistique tirée par les commandes…) ;
- optimisation des tournées de livraison ;
- système de préparation de commandes assistée (voice picking …) ;
- intégration de logiciels de planification de transport.
Mieux gérer les flux
© Comall France - Convoyeur à rouleaux vertical développé par Comall pour le déplacement des cadres avec 4 traverses à rouleaux verticaux en nylon et pieds réglables en hauteur, évitant ainsi le port de charge
« Cela passe nécessairement par une meilleure gestion des flux, un élément incontournable dans la production de menuiseries », constate Catherine Crestey, assistante de direction Comall France : « nous voyons bien que le flux reste un point crucial de développement maintenant que tous les sites de production de menuiseries sont bien équipés en machine ». Une automatisation qui se généralise et qui a une influence réelle sur la volonté des ateliers de s’équiper en complément, d’outils de logistique et de transitique. « Beaucoup de nos clients possèdent des équipements automatisés et cherchent maintenant à investir dans la transitique. Nous sommes là pour faciliter les choses, grâce par exemple à des solutions de stockage intermédiaire », explique Alexandre Giraud, directeur commercial de Ryko France. L’automatisation reste le facteur clé et la transitique doit permettre une continuité de celle-ci tout au long de la ligne de production.
Protéger les opérateurs
© heroal GmbH - Transitique et automatisation dans l’usine de Verl (Allemagne) d’heroal ; l’industriel a très tôt anticipé une "Route de la qualité" entièrement automatisée avec pas moins de 6 caméras sur le parcours pour contrôle de l’usinage des profilés jusqu’à l’emballage
Outre les considérations de productivité, la vraie avancée avec les nouveaux équipements de stockage ou/et de transitique est la baisse de la pénibilité pour les opérateurs. « Il faut que cela soit le produit qui vienne à l’opérateur et non l’inverse », résume Gervais Gendre, ingénieur technico-commercial et chef de marché Menuiserie chez Tecauma. Protéger les opérateurs représente un vrai objectif, reconnaît Sébastien Chartier : « nous avons investi 200 000 euros il y a deux ans et demi dans une transitique plus performante. Il s’agit d’une table relevante et basculante qui permet à l’opérateur de ne plus soulever de charge. Le produit passe de table en table, puis va sur des buffers verticaux avant d’aller dans des nacelles pour finaliser l’opération ». Pour autant, Jean-Marc Boisson ne voit pas de révolution dans le milieu de la transitique et de la logistique dans le monde de la menuiserie : « c’est une assistance aux déplacements qui doit faciliter la vie des opérateurs. Même les petites entreprises sont conscientes que les équipements industriels permettent d’assurer un meilleur confort de travail et une meilleure productivité. C’est pourquoi, en plus d’une assistance aux déplacements, chez MZR nous avons pour politique d’implanter des postes de production dans la transitique car cela permet de réagir aux imprévus pour, par exemple, sortir de la ligne une menuiserie abîmée ». Une transitique efficace doit en effet permettre de gérer les imprévus sur la ligne de production, de lier les postes de travail à la ligne et de gérer les stocks tampons. Le stockage, « où là aussi nous pouvons remarquer une évolution favorable à l’implantation de transstockeurs ». Philippe Buckel, directeur commercial France chez heroal, le confirme : « nous investissons de plus en plus dans des transstockeurs. L’automatisation est toujours plus présente et seul le dernier picking aujourd’hui se fait à la main. Depuis 4-5 ans, nous ressentons vraiment une accélération dans la prise en compte de la pénibilité pour les collaborateurs. Nous allons continuer à automatiser nos process pour aller dans ce sens ». heroal, qui a une démarche globale, ajoute Philippe Buckel : « nous agissons dans plusieurs domaines pour gagner en efficacité logistique. Ainsi, notre principal investissement ces dernières années a été effectué sur une machine permettant un emballage sur mesure pour limiter les déchets. De plus, nous avons investi dans une nouvelle génération de camions plus vertueux en formant tous nos collaborateurs à l’écoconduite ».
Les évolutions majeures en transitique
Convoyeurs modulaires intelligents :
- convoyeurs à bande, rouleaux ou chaînes avec pilotage intelligent, adaptables à plusieurs formats de pièces (cadres, panneaux, portes…) ;
- convoyeurs asservis à la production (déclenchés automatiquement selon les étapes).
Flexibilité et personnalisation :
- solutions de transitique adaptables à des séries courtes ou à des produits sur mesure ;
- réglages automatiques selon les dimensions du produit en temps réel (via capteurs).
Connexion aux machines CNC et centres d'usinage :
- intégration fluide entre la transitique et les cellules robotisées ou CNC, sans intervention humaine ;
- préhenseurs robotisés pour le chargement- déchargement.
Sécurisation des postes de transitique (capteurs de présence, barrières immatérielles)
- réduction des TMS (Troubles Musculo- Squelettiques) via l’automatisation de la manutention.
Des solutions sur mesure
Les solutions existent déjà et la prise de conscience est en train de s’effectuer d’autant que ces investissements viennent aussi compenser une baisse de compétences de manière générale de la main d’œuvre dans la menuiserie et ailleurs. « L’ergonomie des solutions permet de former rapidement les opérateurs, même non qualifiés, et leur assurer un travail en toute sécurité », précise Gervais Gendre. Travailler en sécurité, mais pas seulement, ajoute Catherine Crestey : « assurer les flux avec des équipements professionnels permet de sécuriser l’opérateur, mais aussi de garantir la qualité du produit débité ou à débiter ». La productivité est donc également impactée positivement par ces investissements, même si Alexandre Giraud y met un bémol : « pour moi, la bonne organisation des flux n’est pas toujours synonyme de hausse de productivité ». Une vision personnelle qui ne trouve pas beaucoup d’écho chez ses confrères, lesquels mettent en avant une hausse de la productivité grâce à l’automatisation des lignes incluant le stockage et la transitique. Hausse de la productivité, mais surtout hausse de la qualité grâce à des solutions totalement sur mesure pour répondre aux besoins des entreprises.
‘‘ La transitique, tout le monde en a besoin. Nous essayons de proposer des solutions évolutives et sur mesure en ayant une vision à long terme ’’,
Gervais Gendre, ingénieur technico-commercial et chef de marché Menuiserie chez Tecauma
© Tecauma
Limiter les erreurs
Gervais Gendre nous en dit plus : « il faut être à l’écoute pour faire évoluer nos solutions. Ainsi aujourd’hui, nous proposons des transstockeurs de produits longs allant jusqu’à 14 m car cela répond à un besoin. De plus, pour faciliter la vie des opérateurs et limiter les erreurs, nous avons développé un système de stockage et de regroupement de profils qui va permettre de réunir les 4 profils d’une menuiserie dans une luge commune et ainsi limiter l’emploi de chariots. Une fois que le cadre est complet, il est envoyé à l’opérateur pour qu’il effectue le soudage par exemple avec un prélèvement de produit qui se fait toujours à la même hauteur ». Un système qui évite trop de reprises de produits par les opérateurs et qui va donc diminuer la pénibilité tout en limitant les erreurs. Lesquelles se raréfient grâce à l’utilisation de système de traçabilité performant basé sur la lecture d’un QR Code permettant une gestion en temps réel de la production, en traçant chaque profil de son emplacement de stockage initial à sa livraison. « Cela permet aussi d’envoyer un ordre plus facile à comprendre à l’opérateur pour compenser le manque de qualification des employés », note Alexandre Giraud. Catherine Crestey insiste encore sur l’importance d’une réponse sur mesure : « il ne faut pas rester sur les seuls profils aluminium à gérer, il y aussi des renforts, des parecloses et toute la quincaillerie. C’est pourquoi nous proposons un chariot de transitique pour chaque type de produit avec des casiers adaptés aux différentes hauteurs ».
S’adapter au flux tendu
L’objectif est désormais très souvent de produire uniquement ce qui est commandé, au bon moment, avec le bon degré de finition. Cela nécessite une synchronisation parfaite entre commande, production, transitique, et logistique d’expédition. Une optimisation des "flux tendus" réalisée grâce à une réduction du temps de passage dans l’atelier via un stockage dynamique avec des rayonnages qui se remplissent automatiquement en amont des lignes et des zones de préstockage avant montage, organisées selon la fréquence d’usage. De plus, la mise en place de logistiques tirées par les commandes au lieu de flux poussés, se généralise. Il faut donc savoir s’adapter pour optimiser le process. « En zone logistique, une fois le produit fini, les clients disposent de nombreuses palettes en cours. Lorsque les fenêtres sont terminées, elles sont stockées et dans la zone de palettisation, la navette apporte les produits dans l’ordre approprié. Tout se fait automatiquement et en toute sécurité », explique Gervais Gendre. Quant aux évolutions à venir… à chacun son avis, mais très souvent l’arrivée de l’IA et de lignes de production complètement numérisées et robotisées semble une évidence pour encore renforcer la fluidité des process. À suivre…
© Rénoval - Système transitique dans l’atelier véranda de Rénoval
— Franck Guidicelli
Photo ouverture © Rénoval - Rénoval a investi 200 000€ dans un système transitique il y a un peu plus de deux ans. Ainsi, « plus personne ne soulève de charge », se félicite Sébastien Chartier, directeur général de Rénoval???????