Fixer n’est pas jouer

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Élément discret, la fixation n’en est pas moins primordiale pour garantir la bonne mise en oeuvre des menuiseries et des produits verriers...




... La facilité de pose, les performances accrues, la recyclabilité mais aussi la finesse des pièces, guident aujourd’hui l’innovation du côté des fabricants.

 

" Quand les fixations sortent du cadre… "

 

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© UFME - Philippe Macquart, délégué général de l’Union des fabricants de menuiseries (UFME), un expert qui sait faire le lien et la jonction entre les éléments et problématiques de pose… 

 

C’est un ratio qui donne toute l’ampleur du problème : une fenêtre sur 15 est convenablement mise en œuvre. Un chiffre qui ne sort pas de nulle part, mais de la propre expertise sur le terrain de Philippe Macquart. En sus d’assurer les fonctions de délégué général de l’Union des fabricants de menuiseries (UFME), il est également expert judiciaire auprès du tribunal de Versailles. Et c’est peu dire s’il en voit passer des dossiers de malfaçons avec des mises en œuvre cause de désordres en tout genre. Sur un dossier récent, ce sont ainsi pas moins de 400 fenêtres posées avec des pattes de fixation et des paumelles sous dimensionnées par rapport au poids des menuiseries. Résultat : un affaissement général en raison de produits qui se tordent par manque de rigidité. 

 

« Dans 95 % des cas, ce n’est pas la fixation elle-même qui pose problème, mais celui qui la met en œuvre et qui utilise le mauvais produit au mauvais endroit », résume Philippe Macquart. « Cette jonction entre l’élément menuiserie qui intrinsèquement possède des performances exceptionnelles et le mur qui lui, possède des propriétés de durabilité, de finesse, de dureté du béton et d’isolation qui va conférer à nos bâtiments des durées de vie de plus de cent ans, doit être mieux prise en compte. Le grand défi est de jonctionner tout ça pour que la RE2020 soit respectée. Mais le chemin est encore long en raison d’un problème de connaissance mécanique de ce que doit être une fixation. Les fixations sont probablement le point de liaison entre le mur et les fenêtres qui bat le plus de l’aile et qui représente un point faible qu’il va falloir obligatoirement adresser de manière sérieuse »

 

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© Louineau - Le précadre de Louineau est devenu un best-seller en misant sur la facilité de mise en oeuvre ; le fabricant est aujourd’hui capable de produire 500 précadres par mois. Le double, voire le triple, serait nécessaire pour répondre à la demande du marché

 

Du sérieux, c’est justement ce que l’on retrouve chez Louineau qui s’est fait une place un peu à part dans le monde de la fixation en lançant il y a deux ans son précadre qui permet de garantir l’étanchéité des tableaux de menuiserie et qui est devenu depuis lors un must have du secteur. Un produit doublé peu de temps après par son précadre pour ossature bois – le PrecWood 1400 suivi du PrecWood 1400 standard il y a quelques mois – qui a la particularité et l’avantage d’être certifié CTB par le FCBA. Deux solutions déjà bien installées et qui sont venues résoudre la question épineuse de la mise en oeuvre adéquate. 

 

Louineau s’accroche au Village Olympique 

 

Des innovations qui tombent à pic car contrairement à d’autres matériaux de la construction, le bois connaît une belle santé qui a permis à Louineau de rester à flot, principalement en rénovation. Car sur le neuf, les ventes ont chuté de 25 % sur les derniers mois. Fort heureusement, l’entreprise dispose de deux offres, l’une pour le secteur du neuf et l’autre pour celui de la rénovation. Son précadre offre donc de belles perspectives de maintien de l’activité. D’autant que le spécialiste de la fixation s’est fait une place de choix sur le Village Olympique actuellement en construction en Seine-Saint-Denis pour accueillir la future compétition sportive Paris JO 2024.

 

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© Larenn - L’industriel vendéen Louineau a garanti une partie de son chiffre d’affaires grâce aux beaux volumes de ventes de son précadre Precwood 1400 destiné à la construction en ossature bois

 

« Nous travaillons aujourd’hui sur ce projet avec quatre entreprises du bâtiment sur un précadre qui répond à une vraie demande du marché qui tend vers la construction bois pour répondre aux normes environnementales en vigueur sur le logement et le tertiaire », explique Léa Timores, directrice commerciale et marketing de Louineau. « Avec 3 500 précadres fournis sur deux ans, le Village Olympique représente à ce jour le plus gros marché pour ce produit et une vraie vitrine de notre savoir-faire ». Un savoir-faire qui va bien au-delà du précadre car Louineau n’a pas attendu la conception de ce produit pour devenir une référence sur le marché de la fixation. 

 

Chez l’industriel comme chez d’autres, le constat est également clair : les pattes qui reprennent des poids plus importants dus à des menuiseries plus lourdes est la grande tendance du moment. Des pattes disponibles en différentes épaisseurs, mais dont celle de 1,5 mm, voire 1,8 mm, est désormais plébiscitée pour garantir des résistances mécaniques supérieures. « Si auparavant, les bureaux d’études étaient peu regardants sur les PV d’essai de nos produits, ils sont désormais beaucoup plus attentifs et nous demandent de plus en plus fréquemment de prouver les performances de nos solutions », résume Léa Timores. « Ce changement est dû à un nombre croissant de malfaçons qui contraint les professionnels à s’entourer des précautions techniques nécessaires. Les sinistres en menuiserie augmentent et il convient d’assurer leur bonne fixation au support ». 

 

Pour ce faire, Louineau a travaillé sur une mise en oeuvre qui permet de répondre à un maximum de cas de pose possibles. Objectif : simplifier les opérations, principalement en rénovation notamment, en brevetant des produits. Mais pas seulement. Il s’agit aussi de standardiser au maximum les solutions en les mariant avec celles des gammistes. Louineau dispose ainsi sur l’ensemble des profils des gammistes d’un catalogue conjoint de produits qui correspondent aux spécificités techniques propres. En face de chaque profilé est donc proposée la fixation qui convient. Simple, mais extrêmement efficace et sécurisant, notamment pour des profilés de murs-rideaux ou l’industriel proposant des standards qui correspondent aux épines. Exemple : un profilé Technal possédant côté intérieur une gorge en polyamide. Louineau a donc créé un produit ad hoc pour le gammiste toulousain. Ces partenariats avec les gammistes qui existent depuis plusieurs années se sont du reste amplifiés depuis 2020, avec un travail très en amont sur le couple fixation-profilé. Mais Louineau ne se repose jamais sur ses acquis et lorgne désormais avec son précadre du côté de la préfabrication en se rapprochant de quelques fabricants, principalement dans le domaine de l’ossature bois. 

 

De la visserie simplifiée pour faciliter la mise en œuvre 

 

Mais avant de pouvoir fournir en grandes quantités, l’entreprise vendéenne va devoir résoudre un problème de taille : augmenter sa production. Actuellement, 400 précadres sortent de ses lignes de production chaque mois. Il en faudrait le double, voire davantage, pour répondre à la demande de la préfabrication.

 

« Nous possédons l’outil industriel, mais nous n’avons pas les hommes », confirme Léa Timores. « Si la production de fixations simples ne pose pas de problème, celle du précadre qui demande des qualifications en matière de soudage est beaucoup plus complexe. Nous avons des marchés potentiels sur lesquels nous n’allons pas, car cela nous demanderait de fournir 1 500 unités par mois, ce qui nous est actuellement impossible. Les précadres soudés à la main ont longtemps été notre force mais sont en passe de devenir notre point faible, car les délais de livraison sont trop importants pour les entreprises qui travaillent sur des agendas de travaux de plus en plus réduits »

 

Car en Vendée comme ailleurs, les bras manquent pour faire tourner les machines. Louineau travaille donc actuellement à une refonte de son process industriel avec entre autres des projets d’automatisation de ses chaînes de fabrication. D’ici la fin de l’année, des décisions seront prises notamment pour investir dans des robots et répondre pour prendre de nouveaux marchés. Comme celui du constructeur Maisons Phénix qui s’est rapproché de l’industriel en montrant un intérêt certain pour ces solutions de précadre pour l’habillage de façades. 

 

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© SFS - La visserie de l’industriel suisse SFS ne remplit plus seulement une fonction purement vissage mais intègre également la notion de facilité de pose ; la tendance est aujourd’hui le sur mesure, lequel représente d ‘ores et déjà 25 % de son CA

 

Chez SFS, autre acteur réputé pour la qualité de ses fixations, de sa visserie et de son expertise technique principalement pour la fenêtre sur le marché du résidentiel, l’heure est aussi à la simplification de la mise en œuvre pour pallier cette fois à la pénurie de main d'œuvre sur les chantiers. 

 

« Nous concevons des produits qui ne remplissent plus seulement une fonction purement vissage car ils intègrent aussi désormais la notion de facilité de pose », note Ludovic Faugier, responsable du département bâtiment chez SFS France. Exemple concret : des vis uniquement en T30 pour la fixation d’une fenêtre de sorte que le poseur n’ait pas à changer d’embout en fonction de la menuiserie à mettre en oeuvre. Pour l’industriel suisse qui emploie près de 15 000 personnes dans le monde, dont 300 dans sa filiale française adossée à son usine de Valence, si la branche bâtiment parallèlement au médical et à l’automobile n’est pas la plus importante, c’est toutefois l’une des plus dynamiques. En France, les solutions proposées collent à la demande du marché sans pour autant offrir deux gammes distinctes neuf et rénovation, tant en matière de fabrication de menuiseries qu’en solutions de pose. Si l’industriel était auparavant très présent sur la rénovation de menuiseries bois avec la pose directe des menuiseries sur le dormant, l’heure est désormais au remplacement accru des produits en PVC, voire en aluminium. Même si tout cela demeure encore anecdotique en termes de volumes, la tendance est bien là. SFS dont la spécificité est de fabriquer des vis de pose réglables dispose ainsi son de son best-seller : la gamme SPTR-V, et notamment sa vis V6 particulièrement adaptée au dormant bois. 

 

La fixation sur ossature bois en croissance 

 

Toutefois, avec la montée en puissance de la dépose totale, sa vis V8 est aussi très prisée pour la pose en tunnel sur support maçonné. Autre nouveauté pour SFS : l’isolation thermique par l’extérieur où la pose ne se fait plus en applique côté intérieur, mais côté extérieur, ce qui oblige à utiliser des pattes de fixation. La tendance chez l’industriel est aujourd’hui le sur mesure qui représente d‘ores et déjà 25 % de son chiffre d’affaires et qui est en constante augmentation. Des produits spécifiques qui viennent s’adapter à la nouvelle donne que représente des produits incorporant de plus en plus de matière recyclée pouvant amener quelques différences dans les performances techniques des produits proposés. 

 

« Nous avons revu certaines caractéristiques de notre offre avec des vis en inox pour de l’aluminium, de l’acier pour le PVC, ou encore des solutions bimétal acier-inox », précise Ludovic Faugier. « La croissance de l’ossature bois nous a par ailleurs obligés à revoir nos gammes en essayant d’être innovants et actifs sur un marché par ailleurs très concurrentiel »

 

Si l’entreprise allemande Bohle est connue pour la coupe et la manutention, elle l’est moins sur le segment de la fixation. Elle a pourtant développé un savoir-faire particulier sur le segment du garde-corps avec en 2019 le lancement de son système de profilé en U de montage au sol baptisé VetroMount avec 4 types de profilés : la française classique, à l'anglaise classique, à la française avec une fixation déportée, et enfin à l’anglaise avec une fixation déportée vers le bas. « Ce qui prime avec ce système de verre non percé, c’est la facilité de pose et le temps de pose amélioré car cette solution sans vis permet de régler l’aplomb, l’alignement du vitrage et son maintien assez rapidement », souligne Jérôme Boudy, technico-consultant chez Bohle. « Nous avons deux Avis Techniques sur cette solution, le premier obtenu en 2019 actuellement en cours de renouvellement et le second en 2021 »

 

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© Bohle - Avec quatre variantes de profilés, le système de garde-corps VetroMount® conçu par Bohle, éprouvé et flexible, permet la réalisation d’une grande variété d‘installations. Le certificat d‘essai de l‘autorité générale de la construction (AbP) souligne ses normes de qualité élevées : le système est basé sur un mécanisme de fixation intelligent avec des cales brevetées, assurant l‘ajustement continu des vitres pour une fixation 100% sécurisée dans le profilé 

 

Grosse tendance chez Bohle : la demande croissante de la part des clients d’une intégration accrue sur les chantiers avec une fixation qui doit se faire de plus en plus discrète. Pas évident pour un produit technique essentiel qui garantit la prise en pied du garde-corps et à ce titre, une résistance dans le temps. Mais Bohle est aussi présent sur une autre gamme de produits qui est la fixation par points avec une solution d’entretoises serrées en partie basse, soit sur le limon d’escalier, soit sur le nez de dalle. 

 

Faire disparaître la ferraille 

 

Alternative au VetroMount lorsque celui-ci ne peut s’intégrer, le garde-corps est ici traité par des points de fixation consistant en des vitrages calés en partie basse avec un réglage de l’aplomb. 

 

Avec 40 ans de présence sur le marché de la fixation pour le verre, la société allemande Pauli possède à ce jour une simple représentation commerciale en France. Mais la filiale hexagonale a su se faire un nom sur le marché de la fixation du garde-corps, de la marquise, et de la douche avec des poignées et des barres stabilisatrices. Elle est aussi présente sur l’agencement de portes coulissantes ou sur le segment des fixations diverses comme les panneaux ou les crédences. Au total, l’industriel dispose de quelque 6 500 références qui concernent globalement la fixation du verre autant dans le tertiaire que dans le résidentiel. Et c’est bien dans l’univers du bain que les évolutions se font sentir, y compris au niveau des fixations. Pauli a ainsi lancé il y a trois ans une nouvelle gamme de charnières pour portes de douche lourdes qui joue sur le vissage invisible pour séduire. 

 

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© Pauli - Pauli a notamment présenté lors du dernier salon Bau à Munich en avril dernier, sa solution de garde-corps intégrant des panneaux solaires photovoltaïques

 

« La tendance dans le verre a toujours été pour le client final d’avoir un maximum de matière avec un minimum de fixation, et si cette dernière pouvait disparaître, ce serait encore mieux », admet Alain Gunthner, directeur commercial de Pauli France. « Techniquement, ce concept a ses limites, mais la tendance est clairement d'aller vers des éléments de plus en plus fins avec de moins en moins de ferraille visible »

 

Même lame de fond du côté des garde-corps tout en verre pris en pied, très à la mode depuis quelques années. Principe du système développé par Pauli : des profilés posés en nez de dalle ou sur dalle qui viennent pincer le verre. Du classique certes, mais toujours esthétiquement efface, notamment en maison individuelle où le haut de gamme est recherché. 

 

 

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© Pauli - L’industriel Pauli est présent sur le segment de la fixation notamment de marquises et de garde-corps en verre

 

Mais pour Pauli, la nouveauté réside ailleurs : dans le solaire. Au dernier salon BAU à Munich, l’industriel a dévoilé une solution permettant pour certains garde-corps et marquises d’intégrer à la place du verre clair des panneaux photovoltaïques. Avec deux implications directes, car qui dit panneau, dit câblage. D’où une adaptation au niveau du support de façon à pouvoir faire circuler ce câblage. Pour Pauli comme pour nombre d’autres industriels du secteur, la fixation a depuis bien longtemps quitté l’univers de la quincaillerie pour rejoindre celui de concept technique intégral. Et intégré.

 


Photo ouverture © Technal - Photographes : Dany Eid (DAN) & Agnes Koltay (AK) - Technal fait évoluer sa façade Tental avec une nouvelle offre d’assemblage traverse/traverse et circularité optimisée ; pour les gammistes comme Technal, Louineau propose notamment un catalogue correspondant à la fixation dédiée à la spécificité technique des murs-rideaux par exemple 


Source : verre-menuiserie.com

L'auteur de cet article

photo auteur Steve CARPENTIER
Steve Carpentier est journaliste indépendant depuis 1998 et collabore à plusieurs publications spécialisées dans le secteur de la construction et des travaux publics. Il s'intéresse plus spécifiquement aux questions de l'énergie, de la décarbonation de l'industrie, de l'innovation, de la R&D, de la végétalisation, de la politique de la ville et des transports. Il a été correspondant permanent au Brésil (2005/2016) pour la presse quotidienne nationale ainsi que pour plusieurs médias audiovisuels.
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