Comment construire et rénover décarboné

Comment construire et rénover décarboné

Les enjeux sont tels que la préoccupation commence à être partagée par de nombreux acteurs dans la filière immobilière. Voyons quelles sont les dernières initiatives…




Après la prise de conscience, l’heure est à l’action. Industriels, professionnels de l’immobilier, architectes, éditeurs d’outils digitaux se mobilisent afin de dompter les émissions de gaz à effet de serre du bâtiment. Un sujet désormais présent à tous les étages …

Au plan national, le 8 novembre dernier, Emmanuel Macron a proposé un pacte de décarbonation aux industriels les plus émetteurs de CO2 (essentiellement des cimenteries, mais aussi des sites produisant de l’acier, du verre, de l’aluminium) : « si des projets et des sites sont identifiés d'ici à 18 mois, si vous doublez vos efforts et si on arrive à passer au fonds des 10 millions de tonnes de CO2 évités à 20 millions instruits, nous doublerons les moyens consacrés à cet enjeu et passerons l'enveloppe de 5 à 10 milliards d'euros d'accompagnement public », a t-il promis, cherchant à impulser de nouveaux efforts tout en évitant les délocalisations.

Dans le secteur immobilier, le succès du SIBCA, Salon de l’immobilier bas-carbone au mois de septembre, démontre également la volonté des acteurs de passer à l’action. 6 575 décideurs se sont réunis durant les trois jours du Salon, organisé par l’association pour le développement du bâtiment bas-carbone (BBCA) et France Conventions au Grand Palais Éphémère, pour découvrir les réalisations exemplaires, solutions et initiatives bas-carbone des 120 exposants présents. « Rendez-vous est déjà pris pour le SIBCA 2023 au Grand Palais Éphémère du 21 au 23 septembre 2023. Ce sera l’occasion de partager l’excellence française avec nos partenaires européens et internationaux », a déclaré Stanislas Pottier, président de BBCA. L’association a profité de l’événement pour lancer un nouveau label : "label BBCA quartier", première méthode de mesure et de valorisation des bonnes pratiques bas-carbone exemplaires à l’échelle du quartier. Mis au point en partenariat avec Bouygues Immobilier et son aménageur Urbanera, BNP Paribas Real Estate, Elioth by Egis (pilote du projet) et le CSTB, le label BBCA Quartier vise à mettre en lumière les quartiers exemplaires en termes de décarbonation du cadre de vie et s’attaque au double enjeu de décarboner l’acte d’aménager, tout en fournissant un cadre de vie bas-carbone aux usagers.

 

© SIBCA - SIBCA, le 1er Salon de l’immobilier bas-carbone s’est déroulé à Paris en septembre dernier

 

Dans le cadre du Salon de la construction organisé par Nexity à Paris en mai dernier, Saint-Gobain et Nexity ont signé un partenariat pour développer la construction bas-carbone, pour les marchés des logements et des bureaux. Ce partenariat d’innovation et de coconception permettra notamment le développement des gammes Ywood Résidentiel – bâtiments bas-carbone réalisés grâce à un mode constructif léger en bois – et Essentiel – bâtiments bas-carbone, conçus avec le moins possible de chauffage, ventilation mécanique ou climatisation – de Nexity, afin de proposer au marché une offre de bâtiments bas-carbone durables à coûts maîtrisés.

 

© Saint-Gobain/Nexity - Saint-Gobain et Nexity s’associent pour une construction bas-carbone

 

Au niveau de l’architecture, le lancement du mouvement UNISSON(S), porté par A4MT et l’Institut Français pour la Performance du Bâtiment (IFPEB), cherche à rassembler tous les acteurs des filières s'engageant pour une architecture décarbonée, revisitant le rapport à la nature et aux besoins de chacun. Le mouvement réunit des architectes, paysagistes, maîtres d’ouvrage, concepteurs, élus, écoles, etc. L’objectif ? Faire émerger une nouvelle pensée architecturale en réponse à la dissonance environnementale visible d’un bâtiment. « En plus de son ancrage et de son rayonnement hexagonal, notre dynamique se veut être la représentante d’une "école française" au sein du nouveau Bauhaus européen promu avec la même intention politique par la Commission européenne », précise son manifeste.

 

© Kompozite - Kompozite, la matériauthèque pour évaluer l’impact carbone des procédés

 

Chez les éditeurs d’outils digitaux, la plateforme Kompozite, matériauthèque intelligente, créée en 2020, incubée par le CSTB Lab et Station F, apporte une solution unique de comparaison de systèmes constructifs pour le neuf comme pour la rénovation qui dépasse la simple évaluation de matériaux, tout en calculant l’empreinte carbone des systèmes générés. « En quelques clics, l’utilisateur connaît l’impact carbone de n’importe quel matériau, mais également ses conditions d’utilisation », indique Damien Cuny, CEO et cofondateur de Kompozite. La solution héberge sa propre base de données de plusieurs milliers de références produits, d’abord pour la façade et l’enveloppe, et devrait s’étendre pour proposer une offre complète.

 

 


 

La copropriété, un secteur sur la sellette

 

© Ile-de-France Énergies - La cour de la résidence la Vénerie à Rambouillet avant la rénovation

 

Un sondage IFOP réalisé pour Rénovons collectif (octobre 2022) révèle les tendances de la rénovation sur le marché des copropriétés.

  • La rénovation globale reste encore peu envisagée chez les copropriétaires. À peine plus d’un copropriétaire sur 10 l’envisage.
  • Le coût de cette rénovation et la complexité des démarches les effraient et les copropriétaires préfèrent adopter des petits gestes pour réduire leur consommation énergétique.
  • 1 bailleur sur 2 n’envisage aucune action pour réduire la consommation énergétique du logement qu’il loue.
  • Pour 1 copropriétaire sur 2 (occupant ou bailleur) des solutions et des accompagnements plus simples les inciteraient fortement ou beaucoup à passer le cap de la rénovation globale.
  • Les syndics sont encore peu impliqués dans la rénovation globale (seulement 35 % des copropriétaires ont été sensibilisés à la question par le syndic de leur immeuble).

Pour favoriser les rénovations, Ile-de-France Énergies publie dans le cadre de Rénovons collectif, le programme de rénovation énergétique des copropriétés en France, un guide d’informations pratiques pour « Tout savoir sur la rénovation énergétique de votre copropriété ».

 

© Ile-de-France Énergies - La cour de la résidence la Vénerie à Rambouillet après la rénovation

 

L’ exemple de la résidence la Vénerie à Rambouillet est mis en avant. La copropriété composée de 147 logements et 5 locaux commerciaux date de 1976 -1977. Sa rénovation s’est achevée en 2021. Deux types de travaux ont été réalisés :

  • Au niveau de l’enveloppe : le ravalement avec ITE des 7 bâtiments composant la résidence, l’isolation des planchers des combles et démoussage de la toiture, l’isolation des planchers bas donnant sur l’extérieur, le remplacement des persiennes et des menuiseries privatives et collectives.
  • Au niveau de la ventilation et du chauffage : l’amélioration de la ventilation, des radiateurs, l’installation des répartiteurs de frais de chauffage, des interphones, de l’éclairage des parties communes, la condamnation ou adaptation des vide-ordures.

 


 

 

À l’échelle des fabricants, les entreprises se mobilisent. Ainsi, dans le cadre de son salon virtuel Innovation Now, Schüco, spécialiste des menuiseries en aluminium, a tenu le 26 avril dernier, son quatrième rendez-vous portant sur le thème de la responsabilité environnementale. L’occasion pour Jacques Llados, directeur général de Schüco International SCS de rappeler l’engagement de l’entreprise pour proposer des solutions de construction durable et responsable et les mesures prises pour réduire sa propre empreinte carbone. « Face à l’urgence climatique, la rénovation est le champ sur lequel nous pouvons agir pour réduire les consommations énergétiques et les émissions de GES au cours des prochaines décennies, non seulement sur le logement, mais aussi sur le tertiaire », a notamment affirmé François Gillardeau, directeur général adjoint. Autre parti pris, « contre la production et la pollution, le réemploi des matériaux est idéal. Il doit donc être massifié et réglementé », a martelé Alexandre Krupka, responsable projets et promotion. Un exemple parmi d’autres.

Le secteur du verre est particulièrement visé par la chasse au carbone.

 

© AGC Glass Europe - L’usine de production d’AGC Glass Europe à Moustier en Belgique

 

Autre exemple, AGC Glass Europe a annoncé le lancement de sa nouvelle gamme de produits verriers float bas-carbone, basés sur du verre float clair dont l’empreinte carbone a pu être réduite de plus de 40 % (par comparaison avec la valeur de référence d’AGC Glass Europe), à moins de 7 kg de CO2 par m2 pour le verre clair (épaisseur 4 mm).

 

© Bouygues Immo - Sogeprom Projectim Sensorium  -  À l’occasion de la Soirée de l’immobilier qui s’est tenue le 19 octobre dernier à la CCI Grand Lille, la Fédération des Promoteurs Immobiliers des Hauts-de-France a récompensé 8 projets immobiliers, dont ci-dessus, Bouygues Immo – Sogeprom Projectim Sensorium – Grand Prix régional Caisse d’Epargne.

Depuis 2004, ce concours national décliné à l’échelle des régions récompense des projets immobiliers exemplaires en matière d'innovation, de développement durable et de savoir-faire dans les programmes de logements neufs et d'immobilier tertiaire

 

Ce verre float bas-carbone sera utilisé dans les principales gammes de vitrages fonctionnels d’AGC, à savoir le verre de sécurité (gammes Stratobel et Stratophone), le verre pour l’isolation thermique (gamme iplus) et le verre de contrôle solaire (gammes Stopray, ipasol et Energy). L’usine de production d’AGC Glass Europe à Moustier en Belgique, sera le premier site AGC à produire du verre bas-carbone après avoir opéré une conversion réussie et développer une approche holistique de la durabilité : en soignant des approvisionnements en matières premières de proximité, en utilisant des fours de fusion à haute efficacité, en privilégiant l’usage accru du groisil (verre recyclé), en ayant recours aux énergies vertes, en optimisant le transport entre les sites du groupe pour les traitements de finition ainsi que le transport des produits finis.

 



 

© Maud Caubet Architectes - Exemple de rénovation décarbonée réussie, La tour Racine, anciennement siège de l’ONF, s’est rehaussée en concertation entre acteurs publics et privés ; ce nouveau phare dans le 12e arrondissement de Paris a été redessiné par l’éclairante inspiration de Maud Caubet Architectures

 

 

En marge de la COP27, l’Institut Français pour la Performance du Bâtiment (IFPEB)

a présenté le 10 novembre dernier aux acteurs de l’immobilier

un socle programmatique pour des bâtiments « compatibles neutralité carbone »

 

 

Ni un label, ni une certification, cette démarche ambitionne de baliser un chemin concret et opérationnel vers la neutralité carbone. Le bâtiment est en retard par rapport à ses objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de moins 50 % en 2030. Pour Christophe Rodriguez, directeur adjoint de l’IFPEB, « le concept de neutralité carbone est en effet impossible physiquement à l’échelle d’un bâtiment. Il existe néanmoins des axes programmatiques robustes permettant de réduire de façon immédiate son impact carbone ». Entre 1999 et 2019, le bâtiment n’a réduit ses GES que de 26 %. Pourquoi ce retard ? A cause de l’évolution du parc et de la lenteur de la rénovation. Le parc existant serait responsable de 80 % des émissions de GES du secteur du bâtiment. La priorité devrait donc être donnée à la rénovation, d’autant qu’en 2050, 70 % du parc pourrait être constitué d’immeubles construits avant le RE2020, voire avant la RT 2012. Comment décarboner ?

 

 


 

Miser sur l’économie circulaire

Transformer les déchets en ressources et favoriser la signature circulaire d’un bâtiment, telles sont les ambitions d’Upcyclea, système de gestion circulaire des ressources, présentées lors d’une conférence organisée sur le stand de Wicona à Batimat.

 

© V. Joncheray - Christine Guinebretière, CEO d’Upcyclea, pendant la conférence sur le stand de Wicona à Batimat

 

« Comment décarboner un parc immobilier grâce à l’économie circulaire et au réemploi » : c’est le thème abordé par Christine Guinebretière, CEO d’Upcyclea. Son objectif ? « Permettre aux foncières d’industrialiser l’économie circulaire ».

Upcyclea propose un changement de paradigme et suggère au maître d’ouvrage de dresser un inventaire, un bilan de l’existant des actifs/bâtiments pour les transformer en banques digitales de matériaux. « Et changer le métier de gestionnaire des déchets en gestionnaire des ressources ». L’application myUpcyclea® permet aux entreprises du secteur immobilier et de la construction d’identifier leur patrimoine comme des gisements de ressources, puis grâce à la connaissance exacte des matériaux de faire les meilleurs choix pour leurs projets en se basant sur les "passeports circulaires®" des produits. « En France, les fabricants doivent remplir les fiches FDES, mais elles ne favorisent pas l’économie circulaire », argumente Christine Guinebretière. Le passeport circulaire indique les performances des produits : composition, non-toxicité, part de recyclé/biosourcé, labels, etc. La librairie Upcyclea ambitionne de les référencer grâce à son moteur de recherche avancé. L’application utilise les informations des passeports pour calculer la signature circulaire d’un bâtiment (empreinte CO2, le taux de réemploi, le degré de circularité, le niveau de santé, la valeur résiduelle des produits).

 


 

Un socle en 5 points

 

L’IFPEB avance un socle technique en 5 points :

  • Changer de paradigme : un bâtiment compatible neutralité carbone ne recherche pas à afficher zéro. Il est nécessaire de construire sa stratégie climat autour de 3 piliers : les émissions produites, les émis
  • Activer 3 grands axes programmatiques : intensifier l’usage en utilisant les bâtiments vacants, consommer moins et consommer mieux ;
  • Évaluer son potentiel maximum de décarbonation, car tous les bâtiments ne sont pas égaux en la matière ;
  • Concevoir une stratégie énergétique efficace ;
  • Maîtriser l’impact carbone des matériaux et le réduire au maximum.

Le siège de BNP Paribas Real Estate – Metal 57 – offre une belle illustration de ce qu’il est sions évitées, les émissions négatives ; d’ores et déjà possible d’envisager. Cette opération a consisté en la restructuration et l’extension du bâtiment originel de Claude Vasconi, (1984), situe? sur les Rives de Seine à Boulogne-Billancourt, transformé en 2015 et qui met en scène le full flex (avec 8 % des espaces collaboratifs, 20 % bureaux partagés). « Tous les mètres carrés doivent avoir un usage », martèle Caroline Sainderichin Krief, DGA BNP Paribas Immobilier Promotion. Les ascenseurs, les escaliers sont accès direct, les passerelles sont élargies pour faire des lieux de discussion. Le pari a été pris d’ouvrir au public certains services, le bâtiment comprend donc une « rue intérieure » et propose un auditorium modulable et monétisé, une salle de fitness haut de gamme, un food hall avec un large choix d’expériences de restauration, un pôle de conférence, un restaurant d’entreprise.

 

 


 

"Booster", 2 immeubles, 360 arbres

© Groupe em2c - "Booster", à Saint-Fons (69) - Groupe em2c

 

La dernière réalisation écoconstruite du Groupe em2c "Booster" à Saint-Fons (69), dont la pose de la première pierre a eu lieu en juillet comprend deux immeubles (développant 7 800 m²) et représente de forts enjeux environnementaux :

• Écoconstruction : béton bas-carbone utilisé (-27 % d’émission de CO2).

• Matériaux géolocalisés

• 2 800m² d’espaces verts et 360 arbres plantés

• Toitures végétalisées

• Certification BREEAM niveau Very Good visée

 


 

Vers un Bepos 2.0

 

Sur le parc existant, le chauffage reste le plus gros contributeur avec 82 % des GES en résidentiel et 57 % en tertiaire. D’où la nécessaire sobriété atteignable grâce à la conception bioclimatique du bâti (orientation, qualité de l’enveloppe et de l’isolation, étanchéité à l’air, confort d’été, lumière naturelle, etc.) et à la sobriété des usages. Étant admis que le meilleur kWh est celui qui n’est pas consommé, ou à défaut, celui qui est consommé au meilleur moment. L’IFPEB milite en faveur d’un Bepos 2.0, estimant qu’« il ne s’agit pas de maximiser la production d’énergie et de viser un objectif "positif" annuel, mais bien de rendre le bâtiment flexible et capable de capter les énergies décarbonées au meilleur moment de la journée, semaine, mois (consommer mieux !) et de développer l’autoconsommation ».

 

 

 

— Par Véronique Méot

© Daniel Moulinet - Signé par l’agence VIB architecture, le Norway prend le large sur la presqu’île de Caen ; ce programme d’aménagement urbain qualitatif qui trace un nouveau sillage dans la ville caennaise, concilie les exigences de la ville avec celles du maître d’ouvrage en réduisant la hauteur du bâtiment et en solutionnant les aménagements extérieur ; avec les ouvertures performantes des menuiseries Reynaers aluminium


Source : verre-menuiserie.com

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