Contrôles et centres d’essais doivent faire face à de nouvelles exigences

Une tendance se dessine dans tous les pays et les zones climatiques : les fonctions et les standards à respecter augmentent pour les enveloppes des bâtiments modernes, incluant façades et menuiseries.

« Y a-t-il plus de tests aujourd’hui qu’il y a 10 ans ? »

 

 

« Clairement, oui. Et nous nous sommes équipés pour y faire face. Les changements climatiques pèsent et nous nous préparons à de nouvelles évolutions ».

 


« Tous les tests qui existaient il y a 10 ans sont encore d’actualité. Mais les exigences augmentent. Nous accomplissons 30 % de tests en plus. Au final, nos clients – les transformateurs – veulent davantage de validations sur les produits : par exemple, nous menons davantage d’essais acoustiques qu’auparavant sur les châssis que nous proposons. Si je mets de côté la partie environnementale, la règlementation n’a pas évolué. Mais il est vrai que nous menons plus d’essais de certification internes pour augmenter les argumentaires techniques de nos produits. Il y a 10 ans, nous testions des dimensions de châssis assez basiques. Aujourd’hui, pour suivre les exigences architecturales, nous éprouvons des éléments de plus grandes dimensions. Nos Documents Techniques d’Application (DTA) mentionnent les indications sur la durabilité et le niveau des performances de nos systèmes : c’est nécessaire pour pouvoir mieux les vendre. Nous faisons aussi beaucoup plus qu’avant des essais de résistance à l’effraction. Il s’agit de disposer de plus d’arguments sur la robustesse de nos produits ».

 


« Nous faisons davantage de tests car les produits ont évolué : ils sont plus sophistiqués. Aux tests initiaux s’ajoutent désormais de plus en plus de tests de suivi, induits par les nouvelles typologies de produits. Nous recevons plus de demandes d’usines ayant plusieurs procédés de fabrication, notamment sur la partie warm edge qui se développe depuis une dizaine d’années et le triple vitrage. Le nombre de tests est fonction de la diversification des produits ».

 


« La culture de la qualité est au centre de l’histoire de Finstral depuis 50 ans. On peut même affirmer que le contrôle qualitatif est inscrit dans les gènes de l’entreprise. Nous soumettons nos produits à la double certification allemande et française, ce qui se traduit par un doublement des contrôles pour les profilés que nous extrudons. Nous fabriquons également nos vitrages isolants : nous fonctionnons de manière intégrée. En plus des contrôles exigés par les normes, nous effectuons des contrôles internes renforcés. C’est le cas pour le champ de nos profilés, alors que cela n’est pas demandé par les contrôles NF ».

 

 

« Ce n’est pas qu’un sentiment : avec les problématiques de développement durable, le client veut s’assurer que les menuiseries – fenêtres, coulissants, portes, façades… – sont de plus en plus sûres et que le fabricant s’engage sur les performances de ses produits. Il y a encore quelques années, nous imprimions sur un document les résultats des tests que nous avions obtenus et cela convenait à tout le monde. Aujourd’hui, c’est plus compliqué parce que les valeurs et les besoins en thermie augmentent, comme les besoins en acoustique qui croissent depuis 7 à 8 ans. Et actuellement, avec les bâtiments BBC, les mesures sont souvent contrôlées. Et l’on vérifie les fuites générées par les menuiseries. Les tests sont tenus de prouver les performances annoncées par les professionnels. Forcément, cela les multiplie pour davantage de contraintes en termes de résultats ».

 

Wicona dispose d’un centre d’essais installé dans l’Aisne, à Courmelles, près de Soisson. Il couvre environ 1 000 m² et sert de cadre à une quarantaine de tests par an. Moyennant près de 250 000€, Wicona s’est équipée d’une chambre climatique pour simuler les climats chaud, froid et tempéré et reproduire des cycles de vieillissement de manière accélérée sur des périodes courtes. Il s’agit d’observer comment les façades respirantes se comportent dans toutes les situations. Les essais s’effectuent à des températures comprises entre -20°C et + 85°C - © Wicona/D.R.

 

 

« Du point de vue des moyens que vous consacrez aux tests, ont-ils augmenté sur les plans humains et techniques ? »

 

 


« Les laboratoires sont issus d’investissements lourds que nous menons depuis un peu moins d’une dizaine d’années. Pour être mis sur le marché, tous les produits menuisiers doivent être testés. Nous devons donc vérifier tout ce que nous développons. Et il vaut mieux que nos produits donnent satisfaction avant d’être éprouvés au CSTB car ces tests ont un coût. Le fait de s’équiper tel que nous le sommes aujourd’hui nous donne un avantage pour mettre au point nos produits et pour préparer nos dossiers de certification. Car si elle est bel et bien volontaire, la démarche de certification devient une obligation si l’on ne dispose pas d’un Document Technique d'Application (DTA) produit. Sans DTA, il est difficile de vendre sur le marché français. Étant donné qu’il y a beaucoup de produits qui veulent obtenir ce DTA, il est de plus en plus difficile de retenir une place dans le calendrier extrêmement contraint du CSTB. C’est cet effet qui a conduit le groupe Hydro à investir dans ses différents équipements. Cela lui enlève une part de contrainte et lui permet d’innover plus rapidement ».

 


« Nous avons fait agrandir notre centre d’essais il y a une dizaine d’années. Depuis 6 ans, nous disposons d’un Technology center – notre laboratoire le plus important – qui couvre une surface de 4 500 m2. Nous bénéficions en interne de la capacité de tester les châssis en AEV. Nous pouvons éprouver nos systèmes sur le plan mécanique à travers des essais de cycles sur les châssis, les coulissants, les portes et les fenêtres. Nous forçons nos menuiseries pour savoir comment elles se comportent lorsqu’elles sont maltraitées. Notre chambre acoustique permet des essais en interne. Nous mesurons également la résistance aux chocs, ce que nous appelons pour blaguer le “test de la belle-mère” : nous projetons une charge de 40 kg dans un châssis et celle-ci ne doit pas passer à travers le vitrage.

 

Nous avons également une chambre climatique qui permet de faire tous les essais de durabilité en fonction de la température, de l’humidité, de l’ensoleillement… Grâce à cet équipement, nous faisons varier l’hygrométrie dans le bâtiment. Nous pouvons ainsi déterminer comment nos menuiseries réagissent à la condensation et à l’effet bi-métal, c’est-à-dire la déformation de l’aluminium face au soleil. Nous pratiquons ces tests à Lieu-Saint, en France. Nous avons également un laboratoire interne d'essais pour tous nos éléments électroniques : motorisations pour coulissants ou bien capteurs d’alarme de position de châssis. C’est dans l’air du temps alors que nous menions très peu de tests de ce type il y a 10 ans. En termes d’investissements, nous avons consacré plusieurs centaines de milliers d’euros à nos laboratoires ».

 


« Notre centre d’essais de Toulouse s’est équipé récemment d’un laboratoire d’acoustique. Auparavant, nous devions réaliser la menuiserie chez nous puis la transporter pour accomplir les tests au CSTB, le “notify body” référent en France ou bien au FCBA : c’était très contraignant en termes de coûts et de disponibilité des techniciens. Nous sommes désormais autonomes. Depuis longtemps, nous menons par nous-mêmes tous les tests mécaniques et AEV, les tests de chocs sur les garde-corps, de brouillard salin pour tout ce qui a trait à la corrosion et à la tenue dans le temps des quincailleries ».

 

Organisme certificateur, CEKAL certifie depuis plus de 20 ans la qualité, la durabilité et les performances acoustiques, thermiques et de sécurité des vitrages isolants, feuilletés et trempés © Cekal/D.R.

 


« Notre laboratoire est reconnu par le Cofrac. Nous pouvons très bien mener chez nous un test avec une menuiserie de l’un de nos clients, par exemple. Les résultats que nous obtenons ont la même valeur que ceux que nous aurions pu recueillir au FCBA ou au CSTB. Cela signifie que nous avons une cinquantaine de techniciens, qui savent quoi faire ou ce qu’il faut éviter de faire pour obtenir telle ou telle performance. Des robots nous permettent de simuler des cycles d’ouvertures et de fermetures pour mesurer l’endurance de nos menuiseries. Si une menuiserie neuve devenait une vraie passoire au bout d’un cycle de 5 000 ouvertures/fermetures, cela ne servirait plus à rien. Grâce aux robots, nous mesurons la capabilité des produits : cela nous aide à savoir durant combien d’années la performance est la même. Par exemple, si nous constatons une usure prématurée des roulettes d’un coulissant mais que, par ailleurs, le reste de la menuiserie va bien, nous allons changer la matière des roulettes pour en tester une plus résistante. Mais nous ne pouvons pas opter pour un matériau trop dur car nous risquons alors d’abîmer le rail de roulement. À chaque fois que l’on fait une modification, l’ensemble est retesté et requalifié ».

 


« CEKAL s’occupe de tout ce qui a trait à la partie administrative des tests. Mais les audits et lesessais sont confiés à quatre laboratoires : CEBTP, CSTB, LNE et IFT Rosenheim en Allemagne. Nous menons environ 400 tests annuels, répartis entre les vitrages isolants (150 usines mènent deux tests par an), les vitrages feuilletés (entre 15 et 20 usines font faire des tests par ligne) et les tests ponctuels. Nous menons des tests d’essai global de vieillissement accéléré pour mesurer la durabilité des vitrages isolants. Nous les plaçons dans une enceinte climatique pour les soumettre à la chaleur, à l’humidité, au froid et aux U.V. Nous faisons passer les vitrages d’une enceinte à l’autre durant trois mois, selon des cycles qui nous permettent de simuler 10 années de vieillissement dans un lieu exposé. L’intérêt est de mesurer les sollicitations de façon conjointe pour s’assurer de la durabilité du vitrage. Les performances ne servent pas à grand-chose si le produit ne dure pas. Cela a fait ses preuves : nous n’avons pas connu de sinistres sériels importants depuis de nombreuses années.

 

Les essais de certification sont définis par CEKAL. Ils sont plus sévères que ceux stipulés par la norme européenne sur le vitrage isolant. Celle-ci a également tout son intérêt car elle résulte d'un consensus à l'échelle du continent et représente une obligation légale. L’essai de référence de CEKAL ne devrait pas connaître de modifications à l'avenir. Par ailleurs, nous suivons la définition et les caractéristiques des composants des vitrages. En effet, nous réalisons des essais sur les différents constituants… permettant de détecter plus vite d’éventuels soucis pour éviter que des dommages sériels n’aient lieu. Nous sommes accrédités par le Cofrac sur la norme européenne qui traite de la certification et des certificateurs de produits. S’agissant de la définition de la performance, elle dépend de la composition du vitrage retenu par le client. Il convient de tenir compte de la définition du premier verre, de celle du deuxième verre et du gaz intermédiaire. Le choix de la composition du vitrage dépend du donneur d'ordres et des besoins à remplir sur les plans acoustique, thermique ou de la sécurité. En effet, les vitrages sont censés répondre à un cahier des charges des besoins spécifiques de l’ouvrage. Pour les définir, les maîtres d’ouvrages s’adjoignent les compétences d’un bureau d’études techniques dont les logiciels permettent de calculer les performances attendues en fonction de l’usage, des besoins et de l’orientation géographique du bâtiment. La réflexion est importante,d’autant qu’il n’existe pas une réponse toute faite pour faire face à toutes les situations.

 

À ce niveau, nous essayons de jouer un rôle d’information. Sur notre site Internet, l’on trouve un cahier des charges destiné aux utilisateurs afin de les informer sur le rôle de la certification et les orienter sur les documents de référence liés à la mise en oeuvre des vitrages. Y est également proposée une liste des verres à couches répertoriés avec leur émissivité, leur transmission lumineuse… Si tous les grands verriers ont autant de références, c’est qu’il n’y a pas de produit magique, universel : les besoins changent, les usages changent et les orientations de bâtiments changent. Il faut continuer à "évangéliser" les marchés pour que cette réflexion devienne un réflexe. Et bien entendu, ces données sur les verres à couches émanent aussi de tests (réalisés par des organismes tiers). Il n’y a pas d’information sans tests ».

 

Sur le site d’Unterinn, Bertrand Bedel, directeur commercial de Finstral France, explique à ses visiteurs partenaires-distributeurs Finstral, l’amplitude et la rigueur des tests les plus draconiens menés par Finstral dans ses laboratoires et dans ses différentes unités de fabrication à travers l’Europe © VMA/AB

 

 

« Vous attendez-vous à ce que les tests soient encore plus exigeants d’ici à quelques années, notamment avec l’arrivée de nouvelles normes environnementales ? »

 

 


« Compte tenu de l’évolution des produits et de l’apparition de nouvelles technologies, cela paraîtrait logique. En fonction de la menuiserie, de la géométrie du profilé et de sa technologie, le CSTB demande des essais particuliers. Aujourd’hui, les techniques de vitrages collés permettent d’affiner les profilés. Si vous faites tester un ouvrant très fin, les exigences des tests seront accrues. Néanmoins, mon sentiment est que tous les essais, nombreux, contraignants et coûteux que mènent tous les fabricants sont insuffisamment valorisés vis-à-vis de la clientèle, à la fois en BtoB et en BtoC. Aujourd’hui, un particulier qui veut acheter des fenêtres n’a aucune idée de tous les essais qualitatifs qu’elles ont subis. Mais le fait qu’il y ait des normes et des essais le rassure ».

 


« Je ne pense pas que les essais soient liés à l’aspect environnemental, mais plutôt à la typologie des produits : il faudra prouver qu’ils sont constitués des bons matériaux. Prenons l’exemple des barrettes d’isolation placées dans les fenêtres. Aujourd’hui, elles sont faites de polyamide additionné de différents éléments recyclés. Mais si elles incluaient des matériaux encore plus écologiques, le CSTB demanderait à mieux les connaître et cela pourrait déboucher sur des essais supplémentaires et de nouvelles exigences… Actuellement, la simulation informatique évolue énormément sur toute la capacité d’essais. C’est par ce biais que nous testons nos châssis et leur résistance au poids des vitrages sur les façades mur rideaux : l’informatique permet de simuler une charge sur des matériaux et de constater leur réaction avant que nous ne menions les essais physiques. Cependant, les laboratoires ne sont pas encore prêts à n’accepter que de la simulation informatique. L’essai réel reste la norme car il rassure l’utilisateur final ».

 


« Le durcissement des normes est perçu chez nous comme une opportunité de développement et d’innovation. Cela va faire 35 ans que je suis dans le métier. J’ai commencé avec des produits où il n’y avait pas de rupture de pont thermique. Et toutes les nouvelles normes nous ont amenés à faire évoluer nos produits. Cela va continuer. La RE 2020 nous oblige déjà à travailler différemment : nous devons porter attention au poids carbone du matériau que nous allons utiliser. Les performances thermiques concernent le bâtiment et son environnement et plus seulement la fenêtre. Cette nouvelle évolution nous obligera à mener des essais allant vers davantage de résistance au changement climatique. Il n’est plus suffisant qu’une façade résiste à 600 Pascals à l’eau comme auparavant. Aujourd’hui, on ne peut pas faire de mesures en dessous de 1 500 Pascals. En termes de performances thermiques, nous sommes toujours incités à celles de plus en plus fortes. Nos produits doivent devenir de plus en plus isolants. Au-delà de la norme, le marché pousse à travers la concurrence. Dès que l’on sort un nouveau produit, nous essayons d’aller au-delà de ce que peuvent faire nos confrères. C’est un peu la course à l’échalote, mais l’enjeu futur sera placé sur l’environnement en incluant les méthodes de pose ».

 

 

Technal s’est récemment équipée d’un laboratoire d’acoustique qui génère un niveau de bruit à l’émission d’environ 115 dB avec deux sources omnidirectionnelles. Les mesures s’échelonnent de 100Hz à 5000Hz avec indices d’affaiblissements acoustiques Rw © Technal

 

 

« Il est difficile de répondre à cette question. Mais la tendance – avec les conditions climatiques que nous connaissons, plus les économies d’énergie – devrait s’accentuer. Jusqu’à quel point ? Nous aimerions bien le savoir… Mais les exigences vont s’accroître ».

 

 

 

J.L.C
Photo ouverture : © Finstral/D.R.
Source : verre-menuiserie.com

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