Le cintrage en menuiserie, de précieux atouts

© BVL Serrulac

Métier très technique et à forte valeur ajoutée, le cintrage tire plutôt bien son épingle du jeu. Il suit l?évolution du marché de la menuiserie et se taille la part du lion en rénovation.

Reste à connaître l’évolution du CITE. A ce sujet, il est encore trop tôt pour en tirer des conclusions significatives. Un avis partagé par le PDG de Ouest Cintrage, Pascal Gérault. « Le cintrage n’est jamais assez utilisé », regrette-t-il. « Chez nos clients, dont certains l’intègrent dans les ateliers, il représente 1 à 2 % de la production. Le marché ? C’est l’arbre qui cache la forêt, mais l’on ne se plaint pas. En revanche, aux dires de nos clients, la période serait peu porteuse en ce moment. Et puis, nous avons connu de fortes hausses des matières premières, verre, PVC, aluminium l’an dernier. Conséquence, les industriels restaurent leur marge. De plus, nous sommes très tributaires des coûts de transport ».

 

Outre deux offres de portes cintrées et un catalogue dédié, la société Tellier participe fréquemment à la rénovation d’églises © Tellier

 

Profils Systèmescintre pour ses clients

 

« Chez Profils Systèmes, le cintrage est une petite activité, un complément nécessaire pour nos clients dont certains ne sont pas à l’aise avec cette technique », indique Aymeric Reinert, directeur adjoint. Objectif : livrer un chantier complet. Le gammiste propose plusieurs solutions. Tout d’abord, la fabrication de châssis cintrés chez un client partenaire. Ensuite, la réalisation dans ses ateliers, actuellement, du cintrage à froid, et à la fin de cette année, le pré-usiné, c’est-à-dire des menuiseries en kit prêtes à être montées par le client. « Le cintrage est une technique compliquée à gérer, il nous incombe de mettre en place des solutions simples pour nos clients », conclut Aymeric Reinert.

 

Une succession de châssis fixes cintrés de la gamme Terra Cigala à effet sablé de Profils Systèmes habille un atelier d’artiste situé dans un petit village des Alpilles © Profils Systèmes

 

Une chose est sûre, depuis trois ans l’aluminium progresse en cintrage à l’image de son évolution sur le marché global des menuiseries.

 

Sachant que le gros du marché concerne la rénovation (pas le choix, car le mur est cintré), en neuf, le cintrage se recentre sur de très belles maisons de la Côte d’Azur dotées de menuiseries en formes par exemple, ou s’intéresse aux bâtiments institutionnels, écoles et bibliothèques... Pour Christine Stein, co-gérante d’Alco Cintrage, « le cintrage se porte comme le marché et se trouve également touché par les décisions concernant le crédit d’impôt. Même si ce segment de marché se tasse cette année, le flot de commandes et de devis se maintient ».

 

De son côté, Andreas Montagner, commercial chez Atlantic Cintrage, estime que « le dynamisme perdure, gain de parts de marché à la clé. Et en dépit du retard pris sur des chantiers, par conséquent d’un certain fléchissement, les commandes et devis se poursuivent. Pour autant, cette activité reste très cyclique », souligne-t-il. « Parfois, les architectes prescrivent beaucoup de baies cintrées, mais actuellement les formes droites prévalent. Néanmoins, certains d’entre eux réhabilitent l’oeil de boeuf ». Ce que confirme Rémy Francou, gérant de BVL Serrulac, qui constate « un regain d’intérêt sur l’oeil de boeuf fixe ou ouvrant ».

 

 

Outre des châssis cintrés, Atlantic Cintrage (dix salariés) produit des oeil de boeuf, tant en rénovation qu’en neuf © Atlantic Cintrage

 

Eric Palfroy, gérant fondateur de Cintr’Atlantic, quant à lui, est plus pessimiste. « Le cintre n’est pas quelque chose de contemporain et disparaît des demandes », remarque-t-il. « Ensuite, le marché a subi la crise de 2008. Et si depuis deux ans, l’on constate un regain de commandes, il est artificiel puisque lié à la disparition de confrères. Enfin, les décisions contraires en matière de crédit d’impôt créent des tensions. Un crédit d’impôt qui peut accélérer la décision, mais s’ils veulent changer leurs fenêtres, les particuliers le feront. Plus calme en ce début d’année, le marché en 2019 s’annonce bon malgré les actions des gilets jaunes qui génèrent de l’insécurité ».

 

Cintreurs depuis 16 ans en PVC, Cintr’Atlantic (15 personnes pour un CA de 1,5 M€) travaille l’aluminium depuis trois ans afin de répondre à cette nouvelle demande © Atlantic Cintrage

 

Un métier à forte valeur ajoutée

 

Il n’empêche, le cintrage reste un métier très valorisant. « Il requiert un savoir-faire très particulier », explique Michaël Baron. « Malheureusement, il n’existe aucune formation. Celleci s’effectue en interne, et c’est la première complexité du marché ; les cintreurs sont des salariés rares et précieux »… qu’il faut attirer en entreprise. Une tâche difficile qui explique que le cintrage est de plus en plus externalisé. « Aujourd’hui, la tendance est à la sous-traitance, car le cintrage est un métier qui nécessite de solides qualifications techniques », confirme Pascal Gérault. « Il est difficile, non seulement de trouver des salariés, mais encore des salariés formés ».

 

Importante problématique de recrutement donc. D’ailleurs les industriels possédant un atelier de cintrage passent à la sous-traitance lorsque les cintreurs partent à la retraite. « Ce qui se perd ? Un vrai savoir-faire et les compétences dans les ateliers », indique Rémy Francou. « De plus, les industriels doivent faire face au manque de temps ».

 

Qu’en est-il des attentes des clients ? Pour certains, elles se résument au prix, à l’esthétique et à l’absence de problème de pose. « Outre des délais rapides, les clients recherchent, en priorité, qualité et réactivité », précise Rémy Francou. « C’est la clé du succès. C’est aussi ce qui nous a conduit à mettre en place, il y a cinq-six ans, une nouvelle organisation de production induisant la polyvalence des équipes. Un changement qui a porté ses fruits. Aujourd’hui, en effet, nous avons davantage de salariés formés au cintrage ».

 

Dans la plupart des cas, les particuliers recherchent le respect du patrimoine et de l’identité du bien et les professionnels, savoir-faire technique, accompagnement et services.

 

Le cintrage : un métier ultra valorisant au savoir-faire rare et précieux ; ici, dans les ateliers d’Alco Cintrage (15 personnes, 1,7 M€ de CA) qui agrandit son site à La Seyne-sur-Mer (83) pour répondre à la demande de menuiseries vitrées © Alco Cintrage

 

En un mot, de la réassurance. « Souvent la première question est : comment faire pour ne pas me tromper ? », raconte Michaël Baron. « C’est à nous de leur fournir tous les éléments pour réussir le chantier. Ce qui nous a amené à développer un système d’accompagnement de prise de cotes conforme en tous points à l’existant avec un interlocuteur dédié. Nous nous adaptons au projet du client tant avec les outils, le produit sur-mesure, que la logistique ».

 

Situation identique chez JC Colombo où l’on constate que si les industriels qui font du cintrage sont nombreux, peu ont les quantités justifiant l’achat d’une machine de 50 000 à 70 000 €. « S’il apporte une solide plus-value, le cintrage fait peur à beaucoup de professionnels », constate Jean-Claude Colombo, patron de la société éponyme. « Raison pour laquelle nous formons nos clients sur place en Italie et au moment de la réception de la machine dans l’atelier. Nous les accompagnons aussi après l’installation. Mais en suivant le processus à la lettre, tout se passe généralement bien grâce à l’assistance électronique, qui simplifie le process, aux programmes conviviaux ».

 

Distributeur et importateur de machines de cintrage, JC Colombo présente la 3C Clomea. Cette cintreuse, qui travaille les tubes et profilés en acier, aluminium et PVC, est équipée de trois galets aciers entraineurs et deux galets cintreurs © JC Colombo

 

Des entreprises à l'écoute

 

En matière de cintrage, les entreprises spécialisées font preuve de dynamisme. Tellier par exemple.

 

Située à Chemillé, en Anjou, l'entreprise réalise aussi du cintrage à façon, fabrique des menuiseries cintrées et spécifiques en aluminium. « Nous avons développé la menuiserie aluminium OC 70+ à ouvrant caché afin d’harmoniser la façade de la maison », indique Michaël Baron. Principales caractéristiques : dormant de 70 mm, rayon minimum de cintrage de 300 mm dos de dormant, plein cintre et cintre surbaissé, vitrage 28 ou 31 mm, bicoloration, etc. « Et pour rester dans les délais, nous avons augmenté notre surface de production de 1 000 m2 », poursuit Michaël Baron.

 

Pour sa part, Ouest Cintrage travaille comme sous-traitant en aluminium et PVC. « Notre métier, c’est le PVC, mais aujourd’hui nous produisons beaucoup de portes d’entrée en aluminium », souligne Pascal Gérault.

 

De son côté, BVL Serrulac dispose de sa propre gamme de profils à rupture thermique. « Grâce au profilé très fin, nous proposons le clair de vue le plus important du marché », assure Rémy Francou. « De plus, la variété de profils permet de s’adapter à tous les types de pose ». Mais surtout, depuis deux-trois ans, l’entreprise a mis en place le service Cintrage +. Concrètement, BVL Serrulac cintre, coupe et laque les profils. Le menuisier n’a plus qu’à assembler la fenêtre.

 

Quant au fabricant de menuiseries cintrées Alco Cintrage, il propose le laquage depuis six ans pour un meilleur service client et la souplesse d’organisation. « Par ailleurs, nous sommes en train de construire une extension d’environ 200 m2 », signale Christine Stein. « Nous proposons des menuiseries vitrées depuis 2014. Une activité qui prend de l’ampleur et nécessite de la place ».

 

M.L.


Source : verre-menuiserie.com

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